Les grains de sable
9 mois que les marqueurs ACE et CA 19-9 montent et 6 mois qu'ils sont passés au-dessus de la norme.
9 mois de flux et de reflux telles les vagues de l'océan. 9 mois à traquer ce qui pourrait causer cette augmentation avec le flux des scanners, TEP Scanner, IRM, IRM hépatique, prises de sang d'à peu près tout...puis les reflux des résultats négatifs qui n'expliquent pas, soulagent momentanément mais ne libèrent pas de la charge mentale de ne pas savoir.
Puis avril, un PETscanner qui claire en péri-annexielle gauche : l'ovaire a décidé de se faire flasher à la photo. CA-125 dans les normes, on reflue. On recommence les imageries et prises de sang.
J'avance dans la vie, décroche un job inattendu dans un univers que je ne connaissais pas avec des diplômes que je n'ai pas et pour seules armes motivation, sincérité, envie d'apprendre et d'avancer, et pour seul don celui de l'accompagnement.
J'ai tenu 2 mois : 2 mois à cravacher du matin au soir, de déplacements en réunions pour apprendre le plus vite possible et être opérationnelle pour aider les travailleurs indépendants que j'accompagnais.
2 mois aussi à jongler avec 4 prises de sang, une coloscopie, un scanner, une IRM hépatique, 2 Rdv avec l'oncologue, qui piochent dans mon énergie et mon temps de travail. Alors, je bosse deux fois plus pour rattraper mes absences parce que je ne veux pas que le médical impacte mon travail, parce que je veux prouver qu'on a eu raison de me faire confiance, parce que je ne veux pas décevoir, parce que je ne lâcherai rien !
Et puis, si, je lâche, et c'est bien de lâcher finalement. C'est aussi un univers que je ne connaissais pas et c'est pas mal comme pays. C'est le pays des miroirs, celui où tu te regardes en face et où tu te poses la question de "qu'est-ce que tu veux vraiment toi ?". Et la réponse : "je veux être en paix et ne pas courir après moi-même". Alors de la réponse nait l'action de stopper, toujours avec sincérité.
Je remets en adéquation travail-santé pour qu'ils soient à l'équilibre et entre dans un CDD en association sportive.
J'y suis bien : je retrouve la notion de famille autour du sport et des jeunes, le langage administratif et hiérarchique des fédérations que je côtoie depuis 15 ans. C'est à l'équilibre : j'ai le travail sympa et des horaires qui me permettent de récupérer et d'avoir une vie à côté du professionnel parce que j'ai plein de choses à faire et de gens à voir, et que c'est important pour moi. Ma vie est comme ça : écrire, lire beaucoup, faire du sport et voir les copains. Et aussi j'ai besoin de temps de récupération, plus longs et plus laborieux qu'avant...
On reprend le flux des scanners, IRM, Petscanners, l'ovaire gauche continue à se montrer tel un gyrophare au milieu de la tranquillité de la campagne environnante. Cette fois, on explore à coup d'échographie, d'IRM pelvienne, de bouquins sur le pelvis féminin, on enclenche le plan ORSEC : "étant donné le contexte"... étant donné mon contexte.
On appelle à la rescousse le chirurgien qui me connait bien et on va s'atteler à ce morceau de moi qui a décidé de se prendre pour une star en oubliant l'humilité de la discrétion ainsi qu'à son jumeau qui risquerait de suivre la même voie quelque temps plus tard.
On ne sait pas ce qu'on trouvera, pas vraiment comment on ouvrira, comment on se remettra, comment on refluera de cette logorrhée médicale.
J'ai rangé le travail au placard, incapable de gérer dans un emploi du temps 1.5 mois d'arrêt maladie, 10 RDV pré-opératoires, et la charge mentale de ce marathon holistique. Il doit y avoir un complot contre le fait de travailler. C'est dommage parce que je l'aimais bien ce job, j'y étais à ma place.
En attendant la date du 21/09, je bosse à la coalescence des forces en présence pour accéder à une opération qui se déroule de la meilleure des manières.
"Il y a les grains de sable exposés aux remous et ceux protégés en haut de la plage. Lesquels envier ? Ce n'est pas avec le sable d'en haut, sec et lisse, que l'on construit les châteaux de sable, c'est avec celui qui fraye avec les vagues car ses particules sont coalescentes. Vous arriverez à reconstruire votre château de vie, parce que la tempête vous a rendue solide. Et ce château vous le construirez avec des grains qui vous ressemblent, qui ont aussi connu les déferlantes de la vie, parce qu'avec eux, le ciment est solide" (Agnès Ledig, Juste avant le bonheur)
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Pas de musique aujourd'hui,
Ma tête est pleine de vagues dont le ressac me suffit 💙
J'aime tellement te lire! Je suis émue et à la fois je suis triste. Tu as cette grande force et ce courage qui m'impressionne!
RépondreSupprimerLes mots me manquent... je t'envoie un panier rempli d'amour et de lumière ma belle étoile ! ✨💖