L'heure du retour à la maison a sonné...

 


L'heure du retour à la maison a sonné, l'heure de la confrontation à la réalité également : parce que "oui" l'entrée dans le corps médical a été fracassante et violente, mais ce même milieu hospitalier est aussi une bulle de protection. A chaque question, chaque besoin, j'avais un spécialiste à portée de main.

Et au-delà, comment vivre le retour à la maison en transportant avec moi la maladie ? Parce qu'elle ne va pas rester à la clinique et moi partir librement....
Commet revenir dans un environnement alors que physiquement on a changé ? Que psychologiquement le changement s'opère ?
Est-ce que je serai toujours "adaptée" à l'univers dans lequel je vivais ? Sinon comment vais-je faire ? Aurais-je assez d'énergie pour y amorcer le changement ?

Le retour à la maison, c'est aussi 8 jours pour se remettre d'aplomb et attaquer les chimios pré-opératoires de l'hepatectomie et rendre ma décision au chirurgien digestif de mon choix de centre hospitalier pour l'hepatectomie.

J'ai commencé par essayer de reprendre forme humaine en revenant aux basics. Après avoir perdu 7 kilos en 15 jours : manger, dormir, passage chez le coiffeur, prendre soin de ma peau et de mes ongles qui subiront les effets de la chimio, la reprise des bases était nécessaire.

J'apprends aussi à me débrouiller avec la poche de colostomie. J'ai choisi un matériau souple pour garder ma liberté de mouvement et chaque jour je dois décoller le matériel et repositionner une poche neuve (et vider celle posée tout au long de la journée...).
Je sais que les infirmiers à domicile seront là pour m'aider et que je peux leur demander de la changer quand ils viennent le soir pour les injections d'anticoagulants. Mais s'il y a bien quelque chose que ne m'a pas pris la maladie, c'est mon envie d'être autonome.

Hors de question que pendant les 6 à 12 mois où j'aurai cette poche, je sois tributaire de qui que ce soit d'autre que moi pour la changer. 
Je n'ai fait le changement qu'une fois en semi-autonomie avec l'infirmière stomathérapeute le jour de mon départ de la clinique (avant j'avais une baguette de maintien et il n'était pas autorisé que ce soit quelqu'un d'autre que les infirmiers qui gèrent les changements).

La maison est calme, tout le monde est parti vaquer à ses occupations, j'étale les outils nécessaires dans la salle de bain. Au même titre qu'un soin du visage, je me dis que ce changement de poche est une manière chaque jour de m'occuper de moi. 
Je suis confrontée de plein fouet à l'acceptation du changement de mon corps. Ce bout d'intestin grossier qui sort de mon abdomen (j'ai un bon steak parce que mon intestin est bien abimé), l'intérieur vers l'extérieur, c'est moche...pas la peine de minimiser les choses, "c'est moche" mais il faut faire avec, "alors chère colostomie on se nettoie le bourgeon et on se colle chaque jour une poche bien propre. Puisse-t-on être amies et réussir à cohabiter ! Amen :)"

Changement 1 en autonomie complète réussi. Je prends confiance et je me dis que j'y arriverai chaque jour.

On aura quand même traversé des tempêtes ma poche et moi, des fuites, des brûlures. 
Quand tu sens le socle qui se décolle, quand tu n'es pas chez toi et qu'il faut que tu prévois le matériel "des au cas où", que tu vas aux toilettes vider et changer ta poche...
Chaque jour, elle te rappelle que grâce à elle, tu es en vie mais qu'il va falloir que tu t'adaptes parce qu'elle, elle ne s'adaptera pas ! 

Autonome et dépendante de moi-même, du tout en un...


            "Si la vie n'est qu'un passage, sur ce passage au moins, semons des fleurs" (Montaigne)

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